09 juin 2005 à 22:12

C'est l'automne dans ma tête

C’est l’automne dans ma tête. Il y a des feuilles un peu partout, de toutes les couleurs. Des feuilles qui tombent, qui planent, qui s’élèvent. Au dessus de ma tête, autour de moi. Elles tournoient, elles volent agilement comme si c’était naturel pour elles.

C’est du papier, partout. Du papier vif, du papier encore frais. Les feuilles sont en mouvement, elles se transforment. Elles changent imperceptiblement de couleur. Elles sont poussées par un vent sauvage, de nature presque aléatoire. Elles sont soufflées dans toutes les directions, elles se frottent et se heurtent en bruits secs et subtils. C’est l’automne dans ma tête, et il y a du papier partout.

Il fait froid, mais le vent est chaud. L’air se succède entre le calme froid et les rafales de chaud. Ça me donne le frisson. Et ça en donne au papier.

C’est brumeux. Je ne vois pas très loin, je ne comprends pas trop. Je suis au milieu de nulle part, je reste immobile. C’est gris dans toutes les directions. Les feuilles de couleur sortent et entrent dans ma petite zone de clarté, sans arrêt, et trop vite. Elles viennent d’ici et vont là. Mais il y a trop d’ici et de là, je ne les suis plus. Je me contente de contempler le spectacle, les deux pieds bien ancrés sur ma place d’honneur.

Le vent se calme. Les feuilles se posent. Je suis sur un tapis de couleurs, et je n’ose pas faire un pas devant l’innocente fragilité que je pourrais briser. J’attends calmement. J’observe chacune des petites feuilles, toutes différentes, toutes uniques. Toutes belles et colorées. Mais la tentation est trop forte, j’en saisie une. Du papier d’un beau jaune pur, d’une belle forme parfaite, et juste assez petit pour ma poche.

Comme pour me punir d’avoir osé détruire la beauté de son œuvre, le vent se relève calmement. Le ciel l’accompagne de tous ses tambours. J’entends son vacarme.

Et la pluie tombe. De grosses goûtes d’eau bleues tombent au ralenti. Elles détruisent les feuilles. Les goûtes explosent en frappant les feuilles qui se déchirent et se plient. Les fragments se regroupent en boules sur le sol. Ils s’accumulent en petites montagnes de résidu, dans la terre bouetteuse et la poussière que le vent amène maintenant.

Et la pluie cesse de tomber. Le vent revient, et il est plus sec que jamais. Il assèche ce qu’il reste de couleur. Sous sa force, les fragments de feuilles se plient sur eux-mêmes. Ils perdent leurs couleurs, leur vie. Tout devient trop brun, trop mort. Le papier est mort, avec toute sa naturelle beauté. Il ne reste que le sol brun et l’horizon brumeux gris, dans un calme inquiétant. C’est à ce demander s’il y a eu tout ce papier qui tournoyait vraiment, s’il y a vraiment eu une si belle pureté.

Je ressors de ma poche la feuille jaune. Elle est heureusement intacte, presque miraculée. Le papier est toujours aussi vif. Des écrits remplissent le papier, comme toujours.

Je lis papier. Et les écrits commencent par "C'est l'automne dans ma tête".
Un billet signé Nicolas

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