21 juin 2005 à 18:08

Mon réveil-matin

J’entends renifler. Je reconnais les reniflements, et je les déteste. Je les entends chaque matin depuis quelques semaines. Et à chaque fois, ils me font un peu plus mal.

Ce sont les reniflements de ma mère, qui étouffe ses sanglots du même coup. Elle essaie de se faire la plus discrète possible. Mais il est sept heures du matin, et personne n’est réveillé dans l’appartement, à part elle, et moi, silencieux dans mon lit.

Elle a toujours été comme ça. En période de troubles, ma mère se réveille toujours tôt le matin, parce que son sommeil est trop troublé. Probablement parce que ses rêves lui font trop mal.

Elle se réveille par la douleur et avec la douleur. Mais elle retient ses pleurs pour ne pas nous réveiller, moi et ma sœur. Elle vit sa tristesse par ces reniflements et par des petits gémissements étouffés qui fendent le silence matinal. Elle vit sa douleur pour pouvoir paraître forte à notre réveil, pour jouer sa mère souriante qui élève ses enfants, dont elle est fière, dans le bonheur.

Je me sens mal. Impuissant devant ce malheur qui habite ma mère, incapable de réconforter la femme qui m’a donné la vie.

Je me lève en silence. Je la retrouve dans la salle à dîner. Dès qu’elle me voit, elle se retourne. Le temps d’essuyer rapidement son visage en pleurs, en sortant une assiette comme pour se concentrer sur autre chose. Elle prend le temps de renifler une dernière fois. Pis elle me regarde.

- Qu’est-ce que tu veux manger pour déjeuner ?

Mais j’entends encore les larmes dans sa voix, je lis encore la douleur dans ses yeux.

C’est probablement ce qui fait le plus mal dans le divorce de mes parents.
Un billet signé Nicolas

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Un commentaire de Blogger Pitounsky...

Je reste sans voix et sans mot devant ce texte qui me touche infiniment...

12:35 a.m., juillet 23, 2005  

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